Gaël van der Meij (castanéiculteur)
La ferme du Regain, 1918 route de Valgironne, 07530 – GENESTELLE, à 600 km de Massy
« Je suis paysan depuis 2016, m’étant initialement installé à 21 ans en maraîchage et castanéiculture sur des terres que l’on me prêtait gracieusement. Début 2018 j’ai cessé le maraîchage et me suis concentré sur la production de châtaignes, en nettoyant et rouvrant des châtaigneraies qui avaient été abandonnées. Le gros du travail en phase d’installation consiste donc à permettre aux châtaigniers de produire à nouveau convenablement en supprimant les parties qui auraient pu pousser sous le point de greffe, ainsi que les arbres sauvages qui auraient pu pousser au milieu des vergers. Cela permet de ne récolter que les variétés qui ont été sélectionnées dans le temps pour leurs différentes qualités.
J’ai récupéré, début 2021, 80 ha en location, c’est à dire avec une sécurité qui me permettait de m’installer officiellement. Cela peut paraître beaucoup, mais cela reste des terrains ardéchois, avec souvent plus de cailloux que de végétation, et qui sont pour la plupart non mécanisables avec les tracteurs, donc bien difficiles à travailler. J’ai pu démarrer également l’élevage de brebis, dans le but d’entretenir le territoire et de produire de la viande d’agneaux. Ces deux activités sont très complémentaires, à la fois en terme de gestion du temps de travail puisque les pics ne sont pas au même moment, mais aussi en terme de gestion et de valorisation du territoire, les brebis permettant même d’entretenir les vergers et de valoriser des fruits qui n’auraient pas été ramassés ou même certains déchets de tri.
La première année dans ces nouvelles châtaigneraies j’ai produit entre 11 et 12 tonnes de fruits, certifiés en agriculture biologique et AOP châtaigne d’Ardèche. Je transforme une partie de ces fruits en frais : plusieurs sortes de crèmes (ou confitures) de châtaigne, des marrons au naturel (châtaignes entières en bocaux sous vide) ainsi que de la purée de châtaigne. Une autre partie est séchée puis transformée en farine et brises de châtaignes (séchées et concassées que l’on peut cuisiner comme du riz ou des lentilles). J’en vends aussi en frais sur quelques marchés et aux amaps. Le reste de la production est vendue à un grossiste, qui les distribue ensuite à l’industrie, aux primeurs, aux grilleurs etc… Tous ces débouchés ont leur cohérence et sont interdépendants, car les fruits de chaque variété et même chaque calibre au sein d’une même variété n’auront pas forcément la même vocation finale. Étant en bio il n’y a bien évidemment aucun traitement sur les arbres (les insectes et maladies des fruits s’en donnent souvent à cœur joie!), sur le sol (l’entretien se faisant grâce aux animaux et au débroussaillage manuel) ni sur les fruits après récolte qui sont triés à l’eau par flottaison puis visuellement en les passant sur la table.
En parallèle, par passion pour ce fruit patrimonial de la culture Ardéchoise et Méditerranéenne, je greffe et je plante des jeunes châtaigniers afin de rajeunir des vergers bien trop vieillissants. Cela n’a pas été fait depuis bien longtemps car un arbre met 10 ans avant de commencer à produire, pour commencer à atteindre une production correcte à l’âge de 25/30 ans, et dans une société du court terme c’est inenvisageable de se projeter ainsi. La passion et l’amour de ce fruit et de cet arbre majestueux m’incitent à le faire pour que cette culture puisse se poursuivre dans le temps, malgré le manque de rentabilité immédiate d’un tel travail. »